Synthèse du webinaire « Éthique et conformité : au cœur de la relance »

Sophie Brochu

Sophie Brochu a été nommée présidente-directrice générale (PDG) d’Hydro-Québec en avril 2020, alors que se dessinait une crise sans précédent dans le monde entier. Elle profitait d’une année sabbatique lorsqu’elle a reçu cette offre de l’entreprise gouvernementale, mais, en femme d’action, n’a pas hésité à l’accepter. Elle se devait de prêter main-forte face à ce brouillard qui se présentait à la société.

Avec cette intégrité qui la caractérise et à l’aube d’une relance économique nécessaire pour le Québec et au-delà, elle s’exprime en toute humilité sur la place de l’éthique et de la conformité dans ce processus qui comporte à son avis plusieurs zones grises.

L’omniprésence des zones grises

« Quand on est dans le brouillard, il faut y aller avec humilité et être bien dans le “gris”, souligne-t-elle. Et moi je le suis, pourvu que je sois bien entourée. Hydro-Québec est au service de la société. Nous avons donc dès lors regroupé les forces vives autour de la table et déployé des mesures pour les citoyens du Québec aux prises avec des difficultés financières. »

Trouver comment rebondir face à cette crise, mais aussi aider tous les Québécois à en faire tout autant étaient en tête des priorités de la société d’État, qui est d’ailleurs avec la Caisse de dépôt et placement du Québec l’un des partenaires de la certification en éthique et conformité de l’École des dirigeants HEC Montréal.

« Certes, il y a beaucoup d’attentes envers Hydro-Québec, dont évidemment celle de vouloir s’approcher d’une zone d’exemplarité, mentionne la PDG. Si je dis cela, ce n’est pas parce que nous nous considérons comme exemplaires en matière d’éthique et de conformité, mais plutôt parce qu’on se sent responsables d’avancer de manière résolue et déterminée et d’être extrêmement ouverts aux meilleures pratiques en la matière, que l’on retrouve parfois dans de toutes petites entreprises. »

Selon elle, la capacité d’exemplarité ne vient pas avec la dimension de l’organisation : « Mais la dimension de l’organisation induit une responsabilité quant au vouloir et à la nécessité de progresser dans ce sens-là. »

L’action au sommet

Contrairement à ce qu’on entend souvent par rapport au ton donné par le sommet (« Tone at the Top ») en ce qui a trait à l’impulsion qui appuie l’organisation dans ses choix de valeurs, Sophie Brochu croit plutôt à l’action au sommet : « L’éthique et la conformité dans une entreprise, c’est la somme de celles de chacun des individus qui y travaille. Il suffit d’une seule personne dans la chaîne qui a un écart de comportement pour que l’entièreté de l’organisation soit remise en question. On ne peut pas être différents à la maison et au boulot, et ce n’est pas vrai que c’est noir ou blanc tout le temps. »

Ces zones grises ont aussi trait aux valeurs : d’individus, d’entreprise, de société, qui ne concordent pas toujours. « Ce qui fait qu’on est heureux dans notre profession, c’est quand nos valeurs individuelles collent à celles de l’entreprise, puis que ces dernières sont connectées avec celles de la société dans laquelle on vit, exprime-t-elle. Or, les valeurs d’entreprise restent parfois figées dans le temps, et la société continue d’avancer. C’est cette zone grise dans laquelle on se retrouve qui nous déchire en tant qu’individu. C’est pour cela qu’il est nécessaire de comprendre les évolutions, les mécaniques, identifier les zones grises et nous donner des moyens comme gestionnaires d’y être à l’aise. »

D’où l’importance des espaces de dialogue et des plateformes d’échange pour justement faire cette corrélation entre les valeurs de l’individu et de l’organisation. Et étant donné qu’aujourd’hui le droit à l’erreur est de plus en plus étroit, la question de l’éthique et de la conformité doit être l’affaire de l’entreprise au complet et non d’un département. « Il faut faire attention, car moi je peux définir dans ma tête ce que je considère pour moi être une valeur cardinale de la société québécoise et pour quelqu’un d’autre, ce sera perçu de manière différente, précise Mme Brochu. »

La force de la collectivité

Avec tous ces défis et enjeux, comment entrevoit-elle la relance économique de la société québécoise après cette pandémie? « Aujourd’hui, les Québécois réalisent qu’on est beaucoup plus forts ensemble qu’individuellement, indique-t-elle. Nous avons besoin des uns et des autres pour passer au travers des défis qui sont collectifs. On se rend compte aussi qu’on a besoin de cohérence comme individus, et les organisations ont un travail à faire pour donner ce sens. Nous devons changer nos façons de penser, de nous développer, d’investir, de consommer; on va être ainsi plus cohérents, avec des valeurs plus alignées. »

Et pour ce faire, elle a beaucoup confiance en la jeune génération : « À vous de pousser dans le dos des dirigeants comme moi qui ont 58 ans pour qu’on se retrouve dans un environnement le plus humain, intègre et éthique qui soit. »

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